Les riches heures de Robert Hofer


Pour qui côtoie parfois le photographe Robert Hofer – c’est-à-dire un peu tout le monde en Valais – le personnage séduit par sa gentillesse, une certaine pudeur et son impatience à se mettre au travail, à préparer son matériel, à demander sans déranger, et à obtenir sans contraindre. Ses portraits, où il saisit la personnalité d’une telle ou d’un tel, sont déjà coulés dans l’histoire, au même titre que ceux des portraitistes du XVIII ou du XIXème siècle en Valais. A la différence qu’il y en a cent fois plus.

Après une trentaine d’années de pérégrinations, une septantaine d’ouvrages de toute sorte, il était temps pour le photographe sédunois de faire le point sur une œuvre déjà prolixe de 600 000 négatifs dont 100 000 numérisés. Il en résulte un livre avec un choix de 361 images mises en musique par l’historienne de l’art Julia Hountou. Dans la foulée, le public est invité à visiter les trois expositions que le Musée de Bagnes (éditeur du livre) lui consacre au Châble, sur le barrage de Mauvoisin et à Verbier, les trois avec des supports différents : sur papier, aluminium ou bâche.

En parallèle du travail plutôt codifié des portraits, l’œil du photojournaliste Robert Hofer furète et surprend, s’arrête et saisit la petitesse des gens dans l’immensité des choses, avec une attention particulière pour ceux qui montrent une direction. Dans sa série des doigts pointés il s’attarde sur la main, le bras. Ailleurs c’est le dos de Maurice Chappaz ou celui d’inconnu. Ses portraits de groupe traduisent le large spectre de la société valaisanne et de son quotidien : l’attente, l’anecdote, l’officialité, la fatigue, la communion, la procession, la pause, la joie, etc… C’est dans cet exercice fait de digressions que Hofer nous propose son anthropologie de « photographe de province », comme il se définit lui-même, à l’instar de son maître de l’époque Oswald Ruppen.

L’esthétique de Robert Hofer, le noir et blanc et la dominante du sujet, offre une continuité certaine à la photographie valaisanne. Le photographe isole son sujet, le cadre parfois à l’extrême, sans que cela devienne un procédé trop répétitif. Dans sa représentation, la figure, nette, émerge sur le fond entre lumière et profondeur, silhouette et arrière-plan décoratif. A sa manière, Robert Hofer réinvente le monde à travers sa beauté et sa fugacité.

« Incertain Regard. Introspective d’un photographe de province ». Editions du Musée de Bagnes, 2011. 224 p. 

Robert Hofer. Expositions aux Musée de Bagnes au Châble (tous les jours de 14 à 18 heures jusqu’au 25 septembre), sur le barrage de Mauvoisin et sur les hauts de Verbier.

Article paru dans “Valais-mag”



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