Le canton de Vaud a-t-il encore les moyens des ambitions culturelles de son grand argentier?


Il existe un mystère Vaud.

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Comment un canton qui affiche fièrement sa prospérité peut-il basculer soudainement dans la précarité, voire la pauvreté?

En mars 2017, le grand argentier vaudois annonçait un large excédent des comptes. C’était un mois avant les élections cantonales qui ont vu Pascal Broulis confortablement réélu. Deux mois après, le ministre des finances doit encaisser, c’est le cas de le dire, une vérité peu agréable à entendre. Vaud figure parmi les « bénéficiaires » de la péréquation, cette manne de solidarité typiquement helvétique. Autrement dit, le canton vert et blanc est devenu un assisté du système. Un retour du balancier presque infamant pour une entité qui a figuré longtemps parmi les bienfaiteurs du pays.

Honte suprême, sa rivale Genève trône toujours sur l’estrade des donateurs. La république du bout du lac n’a pas à regretter le non populaire au projet de rénovation du musée d’art et d’histoire, qui lui fait économiser 130 millions de francs. Les Vaudois, eux, n’ont pas voté, et se retrouvent avec une ardoise de 200 millions. Une boîte à chaussures située en bordure de la voie CFF pour abriter leur future vitrine de l’art. Au prix de la destruction d’un bâtiment industriel inscrit au patrimoine historique.

Vaud a-t-il encore les moyens des ambitions culturelles de son chef des finances? Pascal Broulis n’est jamais aussi à l’aise que quand il pérore à propos de politique architecturale et muséale. Son dernier dada est une valorisation du musée romain d’Avenches, une institution qui mérite certes de la considération mais dont le projet d’agrandissement n’en requiert pas moins une dépense de 45 millions de francs. Ceci s’ajoutant à cela, on se demande où le canton va chercher l’argent. En tout cas pas dans la poche des personnes morales qui le délaissent ou bien y licencient à tour de bras, à l’instar des groupes Sicpa et Bombardier.

Broulis est d’autant moins en état de pavoiser que les principales communes du canton ne nagent pas dans l’or non plus et lui font des appels du pied. A commencer par Lausanne dont les recettes fiscales pâtissent du peu d’empressement manifesté par les entreprises pour s’y installer. La métropole lémanique nourrit à son tour de grandes ambitions. Il suffit de citer la Maison du livre, serpent de béton de 170 mètres de long, dont la construction implique le sacrifice de la forêt du Flon, poumon de la métropole. Coût: pas moins de 35 millions.

Corollaire de lourds investissements consentis sans un confortable coussin fiscal, la dette du canton de Vaud prend à nouveau l’ascenseur depuis trois ans. Jusqu’en 2014, elle avait pourtant été ramenée à la portion congrue, ce qui lui vaut un triple A de la part de l’agence de notation Standard & Poors. Laquelle, dans son dernier rapport, remis avant la nouvelle péréquation, n’omet pas de nuancer en ajoutant quelques si et quelques mais…

On ne prête qu’aux riches? Le temps dira si le canton de Vaud s’adapte toujours au dicton.

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