Et la profession Journaliste?


Quand les chemins de fer ont remplacé les diligences, des métiers ont disparu, mais on a continué à transporter des gens d’un point à un autre, toujours plus nombreux, toujours plus rapidement, toujours plus loin, avec d’autres exigences et d’autres avantages.

PAR GÉRALD MORIN

Quand sont arrivés les grands distributeurs et les grandes surfaces, de nombreux petits commerçants ont dû fermer boutique, mais on a toujours continué à vendre des produits aux consommateurs, des produits parfois moins chers et pas toujours de la meilleure des qualités.

Autrefois, il fallait se déplacer pour admirer un tableau dans une exposition, pour voir au théâtre ou au cinéma une pièce, un opéra ou un film, pour participer le dimanche au match de foot du stade voisin ou pour se rendre en librairie acheter un livre. Depuis l’arrivée du disque, du cd, du dvd, de la télévision, d’internet et de la tablette nous n’avons plus vraiment besoin de nous déplacer, les informations viennent directement à nous par voie électronique et en plus grand nombre qu’autrefois.

Il en est de même, aujourd’hui, pour les nouvelles que les journalistes nous livrent. Ces nouvelles que l’on va encore aujourd’hui chercher au kiosque du coin, qui nous arrivent toujours par la poste et que l’on écoute à la radio. Nous les avons également reçues au XXème siècle à travers des petits films d’actualités dans les salles de cinéma. Temps révolu, puisque la télévision occupa rapidement cet espace repris aujourd’hui par les réseaux internet.

Mais qu’en est-il de l’information qui permet au lecteur-citoyen de se renseigner et de s’interroger sur la vie de la société dont il fait partie et dans laquelle il vit ?

Les moyens de diffusion se sont multipliés. Ils atteignent tout public partout à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Les hommes d’affaires utilisent les moyens de diffusion avant tout pour vendre. On vend du transport, on vend des marchandises, on vend donc aussi des annonces et des informations pour faire de l’argent. Et s’il y a un moyen plus rentable de vendre des annonces par un autre véhicule que le journal-papier, alors on change de monture. Les journaux étaient financés par la publicité et les annonces. Ces deux mannes sont parties vers des marchés plus fructueux qui atteignent un plus grand et plus nombreux public. Les journaux deviennent de ce fait les parents pauvres de l’information obligeant les journalistes à réinventer leur mode de communiquer.

Qu’il soit rédacteur en chef, éditorialiste, chroniqueur, documentariste, critique, reporter de guerre, correspondant à l’étranger, photographe ou dessinateur en presse écrite, radio, télévision, film-documentaire ou on line, le journaliste voit sa fonction et sa façon de travailler complètement changer. Sachant qu’avec le numérique le lecteur-spectateur-auditeur peut tout lire, tout voir, tout entendre, réagir et intervenir à tout moment et en tout lieu.

À chaque changement de monture, quelqu’un perd des plumes. À moins que, tout en choisissant de garder la déontologie de sa profession, le journaliste prenne le risque de devenir son propre éditeur en adaptant ses différents domaines d’écriture aux nouveaux modes de diffusion mais aussi à la nouvelle manière de consommer l’information par le lecteur-citoyen plus connecté, parfois plus exigeant, mais aussi plus individualiste qu’autrefois ayant une tendance à vivre dans un univers de café du commerce permanent.

Le journaliste devra continuer à enquêter, écouter, collecter, vérifier, sélectionner, synthétiser, commenter des faits et bien-sûr « posséder une capacité à comprendre et à retranscrire en termes intelligibles par le plus grand nombre une information à priori ‘difficile’, afin qu’elle ne demeure pas réservée à un cercle d’initiés » (François Heinderyckx).

L’auteur est rédacteur en chef du magazine CultureEnjeu. Editorial à paraître dans CultureEnjeu No 55, septembre 2017.

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