«La prise d’influence politique au sein de notre journal met en danger notre crédibilité (…). L’instrumentalisation de la BaZ nuit à notre image, non seulement auprès du lectorat mais aussi auprès des annonceurs», écrivent les journalistes de la BaZ. Ceux-ci rappellent à Martin Wagner que lors de son entrée dans le capital du journal, il avait promis de se battre pour l’indépendance du quotidien bâlois. «Nous devons constater que vous vous êtes retiré trop tôt de la direction de l’entreprise», déplore la rédaction.
Alors que l’on attend la réponse de M. Wagner, les commentaires vont bon train sur les intentions de l’avocat bâlois dont le parcours au sein de la BaZ a été jusqu’ici semé d’embûches. En mai, quand la BaZ se met à la recherche d’un nouveau rédacteur en chef, l’éditeur propose une solution «bâloise», en l’occurrence Urs Buess, alors rédacteur en chef adjoint de la BaZ, et Jürg Lehmann, l’ancien chef d’édition de la BaZ. Mais Tito Tettamanti met son veto.
C’est finalement Markus Somm, un blochérien convaincu, qui sera nommé trois mois plus tard. Les éditoriaux de la BaZ prennent un ton nettement plus musclé, dans la ligne ultralibérale de la droite conservatrice. Pour remercier le propriétaire de la BaZ, Somm lui ouvre les colonnes du journal en date du 6 novembre, jour des huitante ans de Tito Tettamanti. Le Tessinois, farouche contempteur de Bruxelles, y déploie son artillerie favorite: la Suisse doit s’inspirer de Singapour… On apprendra plus tard que ce texte, refusé au départ par la rédaction, avait été rédigé par Markus Somm en personne.
Pour les observateurs, il ne fait pas de doute que les derniers événements confirment une stratégie médiatique visant à créer une constellation de journaux de tendance blochérienne. En témoigne la tentative, menée par MM. Tettamanti et consorts, de mettre la main sur le groupe argovien Mittellandzeitung. Devant la résistance de l’éditeur Peter Wanner, un radical à ce jour peu disposé à donner de nouvelles armes à l’UDC, l’opération s’est soldée par un échec. D’aucuns n’excluent pas non plus l’arrivée d’un groupe concurrent sur la scène médiatique bâloise. On parle de la NZZ ou de Tamedia. Dans ces conditions, personne ne serait très surpris que Martin Wagner jette l’éponge.
Article paru dans “La Liberté” du 16 novembre 2010
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