Facebook, que d’amis!


La plateforme Facebook offre l’opportunité d’étendre son réseau de relations. Mais elle a, par là, dénaturé la notion d’ami.

PAR JEAN-CLAUDE CREVOISIER

On vous fait croire que pour se faire des amis, il faut utiliser Facebook. Or un ami, c’est autre chose que l’inconnu rencontré sur cette plateforme informatique, même si vous partagez avec lui quelques centres d’intérêt.

Ce n’est pas le média qui est ici en jeu. La virtualité de la relation n’empêche pas, par principe, la réalité possible de sentiments partagés. Mais la rencontre physique de deux personnes est en définitive consubstantielle d’une amitié vraie; elle permet de faire plus amplement connaissance, d’utiliser notamment le non verbal (et le non écrit) pour affiner l’échange et la compréhension réciproque, elle inscrit en outre la relation dans la durée. De plus, la présence humaine est indispensable pour faire passer l’indicible entre deux êtres. Et une rupture d’amitié (tout peut arriver) n’est pas un acte banal. Elle ne se réduit pas, comme cela est possible sur Facebook, à bloquer l’accès de son domaine (de son «mur») aux intrus indésirables.

Cela dit, constatons qu’il y a de tout et souvent n’importe quoi sur Facebook. On y rencontre en effet plusieurs types d’usagers.

Il y a d’abord ceux qui veulent exister et qui ont besoin pour cela d’avoir un public. Un public auquel ils balanceront de façon continue et quasi compulsive leurs autoportraits (effet narcissique), le témoignage vidéo de leurs «exploits» (pas toujours très reluisants), leurs pensées (si l’on peut dire) définitives, l’affirmation aveugle de leurs sympathies et l’expression butée de leurs aversions.

Il y a aussi ceux, généreux de leurs découvertes, qui les jugent intéressantes ou utiles et dignes d’être partagées: des photos et des vidéos artistiques ou témoins d’événements particuliers, des coups de cœur musicaux, des aphorismes, des adresses de sites Internet, des dessins humoristiques.

Il y a encore les militants qui font acte de prosélytisme en envoyant profession de foi, coups de gueule, tracts et invitation à manifester ou à signer une pétition.

Il y a enfin ceux qui utiliseront très prosaïquement la plateforme, comme par exemple certains politiciens, pour des actions publicitaires plus ou moins intéressées.

Précisons que cette catégorisation des usagers de Facebook n’exclut pas, pour certains, le mélange des genres.

Voilà pour les contributeurs et producteurs de contenus. Mais il y a aussi ceux qui se sont inscrits en se contentant d’un statut d’observateur passif du phénomène et de la déferlante de textes, d’images et de sons de leurs «amis». Des voyeurs ou de simples témoins de la variété des expressions et des engouements humains?

Laissons de côté ceux qui n’ont pas de compte ouvert sur Facebook et qui s’en accommodent fort bien.

Cette cohabitation sur Facebook de personnages aussi hétéroclites n’a rien en soi de rédhibitoire. On peut d’ailleurs assez facilement faire le tri de ses «amis» en «coupant le sifflet» des importuns. On ne va donc pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Mais pour que rien de fâcheux ne nous arrive, nous devons savoir que les traces personnelles laissées sur Facebook sont quasi indélébiles. Cela doit inciter à l’économie autant qu’au contrôle des états d’âme comme des pulsions trop passionnées et pousser à l’extrême prudence dans l’exhibitionnisme.

Article paru dans “Courant d’Idées

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Un commentaire à “Facebook, que d’amis!”

  1. Artémis 4 février 2013 at 19:44 #

    Excellent!

    Le bouc est un animal amusant, dont l’odeur se reconnaît de loin, pour les chèvres probablement irrésistible,
    le bouc fait face, sacré face de bouc,
    pas comme beaucoup, fous de look, qui effacent goût, souk et book, à bas Facebook!

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