Pôle muséal, l’addition passe à 183,5 millions











Le Conseil d’Etat a choisi le site des anciennes halles CFF (photo la Méduse) pour improviser une conférence de presse sur l’état de son projet de Pôle muséal. 

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Il faisait cru, ce lundi 6 janvier 2014, à l’endroit qui, il y a deux ans encore, palpitait au rythme des «locs» rentrant au dépôt. Dans ce lieu protégé, livré depuis aux liserons par les CFF, le message du gouvernement aurait pu être: dépêchons-nous de construire un bâtiment où personnes et choses seront  bien au chaud.

Oui, mais à quel prix, propre et figuré? L’information principale a été apportée par le syndic Brélaz: le projet de Pôle muséal, c’est d’abord le Musée cantonal des Beaux-Arts, en l’état sis au Palais de Rumine, mais c’est aussi le musée de l’Elysée et le Musée de design et d’arts appliqués contemporain (mudac). Or si l’on connaissait le coût du déménagement du premier – la première estimation de 70 millions a tout de même été relevée pour passer à 83,5 millions -, on ignorait jusqu’ici à combien se montait la dépense pour les deux autres projets. Elle s’élèvera à 100 millions, ce qui porte à 183,5 millions l’addition finale. Si tant est qu’il n’y ait pas de dépassements!

Comment financera-t-on cette bâtisse dont nul ne soupçonnait l’ampleur démesurée en 2009, avant que le Conseil d’Etat ne finisse par tourner le dos au premier choix de la commission d’experts qu’il avait pourtant mandatée, à savoir le projet beaucoup plus raisonnable dit Musée-Cité à l’emplacement de la Riponne? La part étatique s’élevant à 30,63 millions – sans compter un crédit d’étude de 12,95 millions pour la deuxième phase, le paquet de 43,5 millions fait l’objet d’un décret que le Conseil d’Etat a transmis le 18 décembre au Grand Conseil vaudois – les promoteurs du projet comptent sur les fonds privés pour subventionner la construction à hauteur de 40% environ. 26 millions ont été engrangés à ce jour, manquent donc une poignée de millions pour parvenir aux 34 millions nécessaires. Concernant la première phase, le Musée cantonal des Beaux-Arts à proprement parler, le Conseil d’Etat estime donc être à bout touchant car 5 millions proviendront encore notamment de la ville de Lausanne et 2,5 millions de la Fondation Leenaards.

Aucune précision n’a été apportée en revanche sur les chances de réussir le financement du deuxième étage du pôle, les 100 millions précités. Ici encore, la part privée escomptée atteindra 40%. Le canton paiera 40% et les 20% restants reviendront à la commune de Lausanne. A la question de savoir si l’Etat mettra la main au porte-monnaie pour éponger la facture en cas de défection des sponsors, le ministre des finances Pascal Broulis a répondu par la négative, ajoutant qu’il conviendrait alors de redimensionner le projet. Dont acte.

Toujours optimiste, sa collègue Anne-Catherine Lyon a ajouté qu’à son avis l’argent privé ne demande qu’à s’adapter à l’avancement du projet. En d’autres termes, bâtissons, bâtissons, le saucissonnage est le meilleur moyen d’entraîner les bailleurs de fonds dans une spirale ascendante. Unique concession faite cette fois aux caprices de la météo, la cheffe de la culture n’a pas occulté l’hypothèse d’un recours au Tribunal fédéral, susceptible de  retarder la procédure au cours des prochains mois. Après le rejet par le Tribunal cantonal des recours déposés contre le plan d’affectation du Pôle muséal, le Collectif Gare avait annoncé qu’il entendait interpeller la cour suprême. Confirmation de cette décision sera donnée prochainement.

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3 commmentaires à “Pôle muséal, l’addition passe à 183,5 millions”

  1. U. des Scex 7 janvier 2014 at 22:47 #

    Cette valse des millions n’aurait-elle pas un côté sulfureux?

    A diviser autant de millions par le montant de mes impôts, je pense que nous pourrions bien être quelques dizaines de milliers de mon espèce à voir nos contributions annuelles gaspillées dans un projet qui est un pur non sens, autant dire jetées par la fenêtre! Même chez les Vaudois on pourrait craindre une révolte, un musée poussé à l’eau.

    Heureusement, cette fois-ci des mécènes sortent du bois, comme au compte-gouttes, juste à point nommé pour nous éviter de déraper dans les vilaines pensées ci-dessus.

    C’est ainsi que le 21 decembre 2012, le père Noël a passé avec un rien d’avance déposer un cadeau dans les pompes de notre grand argentier: un don de 10 millions, anonyme!
    http://www.rts.ch/info/regions/vaud/4526726-le-pole-museal-lausannois-recoit-un-don-anonyme-de-10-millions-de-francs.html

    Quelle aubaine inespérée, 10 millions anonymes, ni explications à donner ni comptes à rendre.

    Mais voilà, je ne crois plus au père Noël, je n’arrive plus à jouer la surprise en découvrant les oeufs de Pasques que j’ai caché moi-même. Le dicton est clair: “Si la réalite est trop belle pour être vraie, c’est que c’est certainement le cas!”

    Si ce n’est le père Noël, alors qui est la bonne fée? Mais voilà, je ne crois même plus aux bonnes fées …

    Dernière solution: à qui profite le crime? Qui peut tirer de cette abracadabrante construction muséale un bénéfice assez substantiel pour en soustraire 10 millions afin d’assurer la réussite du projet? Là j’ai pu émettre une hypothèse, une supposition, rien de plus bien sûr!!! Réponse: CFF Immobilier! … d’ailleurs d’où vient l’idée du Pôle muséal? Que pouvaient faire les CFF de la surface incriminée, avec cette “maudite” halle aux locomotives protégée en classe 2.

    Vu sous cet angle, l’échange sous-jacent de terrains avec la commune de Lausanne est certainement une affaire à côté de laquelle 10 millions ne sont qu’une paille. Mais j’insiste, ce n’est là qu’une supposition face à une forme de mécenat plus que gênante, qui permet tous les dérapages, et le dicton me dit de ne pas rêver!

    Au fait, à propos de rêves, la surveillance des finances cantonales par la Confédération, c’est pour quand?

    NB: “Pour atteindre les objectifs financiers du propriétaire, le secteur Immobilier doit générer
    245 millions de francs par an pendant les 20 prochaines années”, extrait de
    “Immobiliers CFF – Examen de l’identification et de la réaffectation des biens immobiliers non destinés à l’exploitation” Publication 02.2012
    http://www.efk.admin.ch/index.php?option=com_content&view=article&id=186&Itemid=187&lang=fr

  2. Thibaut 8 janvier 2014 at 09:08 #

    Les causes les plus justes sont les plus désespérées!

    Néanmoins, j’ai une sorte de sourde conviction que la situation économique, ou plus largement le changement des mentalités des jeunes générations, fera capoter le projet… il mourra de lui-même, avant que les promoteurs puissent installer leurs grands pieds dans ces hangars.

    Il importe d’insister sur la désertification du centre-ville. Il faut repenser la Riponne, ratée bien avant d’avoir été achevée. Vive… l’action, chère à Denis de Rougemont.

    Le coût de toutes ces études d’impact et autres concours d’architecture (je ne me souviens plus très bien du nom de ces appellations contrôlées) est SCANDALEUX!

    La gare avec son milliard décidé à Berne l’est tout autant. Le hub CFF devrait se situer à Renens ou à Malley… là où se distribuent déjà les lignes entre Genève, Zurich ou le Valais!

    La Suisse, ce pays d’enfants gâtés, de confort mortifère et de démesure matérielle.

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  1. Le Pôle muséal: une facture de 200 millions de francs… pour commencer | Collectif gare - 8 janvier 2014

    […] plus raisonnable dit Musée-Cité à l’emplacement de la Riponne? Lire la suite sur le site de La Méduse This entry was posted in Pôle muséal. Bookmark the permalink. ← Stopper le rouleau […]

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