Afghanistan, jardin de roses en bouton


Silence, ignorance dans le double sens de la volonté d’ignorer ou le manque de connaissance, aveuglement inconscient ou volontaire…

PAR SIMA DAKKUS RASSOUL

J’ai passé une grande partie des deux derniers jours à intervenir sur le forum d’Arrêt sur image, pour pousser un cri sur le fait que le nom de l’Afghanistan apparaît toujours lors de catastrophes. Je me souviens comme hier du 11 septembre. Puis silence radio sur tous les médias ou presque. Sinon des nouvelles formatées et collant à l’image stéréotypée de ce pays où je suis née.

Ici, j’ai décidé de parler de tout ce qui est sensible dans ce pays pour qui comme moi est à l’écoute quotidienne des nouvelles. En ceci étant aidée par les médias afghans qui sont exemplaires. Je ne le répéterai jamais assez. Sans compter une très riche collection d’émissions sur les réseaux sociaux. J’ai déjà mentionné l’excellent travail de Shafie Ayar activiste, analyste, connaisseur de la culture afghane, installé depuis des années aux Etats-Unis. Il connaît l’histoire du pays et l’expérience de la prison pour raison politique. Il joue un rôle très important dans le lien qu’il crée entre les Afghans.

Les médias afghans ne font appel qu’aux Afghans spécialistes et émettent en langue pashto et dari, langues officielles du pays. Ceci me semble très symptomatique de l’absence d’attentes des Afghans face à l’extérieur. Ils ont compris à juste titre que leur sort est parfaitement indifférent à notre monde que j’appelle avancé. Et que seul comptent toutes sortes d’intérêts de chacun sur les bénéfices à tirer de ce pays, matériels, stratégiques, etc.

Cela pourrait être une provocation, mais ce ne l’est pas. Ces années de suivi des nouvelles afghanes – sorte de double vie pour ma «double racine» – j’ai appris plus sur le monde et sur la Syrie, notamment, que par nos journaux et médias là où je fais ma vie. Depuis des mois, les nouvelles sur la Syrie provoquent des inquiétudes dans les médias et les esprits éclairés en Afghanistan. La «syrisation» de l’Afghanistan est une réelle préoccupation dans le pays.

On a partagé le monde après la seconde guerre mondiale en zones d’influences réparties entre les puissances. La chute du mur a bousculé tout cela et redistribué les cartes. Et j’ai vu naître ces dernières années un glissement stratégique où la nouvelle répartition du gâteau “monde” se fait sur le dos des pays comme l’Afghanistan.

L’Afghanistan a changé, souffert, subi des pertes sans retour. Quarante ans de guerres, des générations entières amputées de leur vie. Des millions de réfugiés, maltraités par les pays voisins. Un scandale au vu et au su du monde. Mais, de plus en plus d’Afghans et d’Afghanes se battent pour étudier, pour créer, pour se dessiner un avenir en se confrontant à l’horreur. L’instruction est encore bloquée par les obscurantistes qui ne sont pas tous religieux, loin de là, mais cela ne suffit pas à arrêter la soif des jeunes Afghans, hommes et femmes.

On prend les Afghans pour des combattants – et cela nous arrange bien – mais ce sont des battants et des battantes. Ils n’ont pour la plupart de pauvre que la situation matérielle. Une culture d’une richesse inouïe, de l’invention pour se débrouiller à partir de rien.

De l’éveil où que nous soyons! Il en va du dessin futur de l’humanité et de sa signification. Pour terminer sur une note optimiste, notre inculture dominante, concernant tout ce qui n’est pas nous, dans les différentes facettes de leur réalité n’est pas une fatalité.

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2 commmentaires à “Afghanistan, jardin de roses en bouton”

  1. Michelle 16 avril 2017 at 16:24 #

    Très intéressant. Merci de nous rappeler que d’autres richesses sont bien plus vivantes que celles matérielles. Bonnes Pâques.

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    Sima Dakkus Rassoul 16 avril 2017 at 16:29 #

    Merci à vous de votre intérêt et de votre lecture!
    Bonnes Pâques.

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