Les décès s’enchaînent, sans trêve, et les personnalités s’enterrent.
PAR L’EPISTOLERO
Les médias font des nécros. RIP. On en lit des tas et il y a des tweets d’État. La célébrité est réduite à sa plus simple expression : une Une, une photo, une page, deux colonnes, une colonne ou un entre-filet pour petite célébrité. Le journaliste s’occupe de collecter les regrets. C’est la personne à gratter.
Aretha n’est plus.
Derrière chaque personnalité, il peut y avoir une personne alitée. Toute star a une fin. C’est de la néchronologie.
Respect.
Elle marche sur le nécrofil médiatique. Funambule funèbre. Après sa mort, elle est de corvée de tweets. Ça n’en finit pas, d’hommage en hommage. Six tweets sous terre et bien plus.
Chez les stars, le décès a un drôle de pluriel : décélébrités. C’est de la nécro nécrophage. On entretient sa célébrité en tweetant son hommage à une célébrité qui ne tweetera plus. Le mort n’a plus le dernier mot. On le lui vole. Il y aura sans doute bientôt des recueils des premiers tweets après la mort de célébrités.
She was a great woman, with a wonderful gift from God, her voice. She will be missed!
D.Trump
Malgré tout, les mots ne manquent jamais pour les morituri qui sont morts et qu’on salue. Pour ça, personne n’a besoin dead. Comme les morts entrent tout seuls, les mots sortent tout seuls. C’est du Deadxit.
« Aretha Franklin ne chantera plus », drôle de formule qui nie l’immortalité des chansons.
La presse a un goût de goule, un air de feuilles mortes. Quand le sang ne circule plus, il devient sang d’encre. C’est fatal. Nos chers disparus valent cher. C’est de l’encreterrement, de la mort en direct, ink et nunc, c’est l’empilement de little boxes, du container à ténèbres, pile à leur mort.
Pas trop vite, quand même, la dépêche. On ne meurt qu’une fois. Il faut se méfier du little hoax (la fosse nouvelle) et des tuyaux crevés.
Sinistre « Les causes de sa mort révélées », alors qu’on attend un rappel digne de la Queen of Soul, un flamboyant Les Grandes Causes de sa vie révélées. Une voix qui reste et qui vient des églises à gospel de Détroit et qui continuera à avancer aussi puissante qu’une marche pour les droits civiques. L’enfant prodige bien avant The Voice et les pros DJ.
Aretha ou ἀρετή (aretê) qui signifie, en grec, « mérite ou qualité par quoi on excelle » ou « qualité de l’intelligence, de l’âme » (Dictionnaire Bailly).
Le langage ment, l’engagement non.
Aretha a gagné. Aretha now. Aretha won.
