Le retour des généraux


Je vous parle d’un temps que les moins de… 50 ans ne peuvent pas connaître.

En ce temps-là les dictatures pullulaient sur la carte du monde. Elles sévissaient dans l’ex-URSS et ses affidés d’Europe centrale et orientale. En Chine, au Portugal.

En ce temps-là, des généraux régnaient aux quatre coins du globe. En Amérique latine, en Espagne et même en France!

La Grèce n’avait pas de généraux mais des colonels. En voyage de noces dans le golfe de Corinthe, votre serviteur a failli devenir leur otage en juillet 1974. Quelques heures après son départ survenait un putsch, les frontières ont été fermées, les navires bloqués.

La Suisse non plus n’a pas de généraux, sauf en temps de guerre, cela règle la question. Mais elle a des colonels. Et un caporal, Guy Parmelin, qui veille au grain. Oh non, pas de la manière que vous croyez, le brave homme ne ferait pas de mal à une mouche. Mais il se préoccupe de l’armement du pays, surtout de sa défense aérienne. Quel avion de chasse succédera au F/A-18? Mystère et boule de gomme. En attendant des officiers helvétiques participent en tant qu’observateurs aux dernières manoeuvres de l’OTAN.

Le ministre des armées a sa logique car la planète reste belliqueuse. L’ultralibéralisme et son cortège de conséquences funestes comme le creusement des inégalités mettent à mal les expériences sociales menées au nom de la démocratie. Au Venezuela, l’échec de la révolution bolivarienne tient moins à la chute des cours du pétrole – lesquels remontent de manière brutale, soit dit en passant – qu’à l’explosion endémique de la corruption. En tapinois, l’armée, dont était issu Chavez, d’ailleurs, est devenue le véritable arbitre du débat.

Au Brésil, la dérive dramatique vers l’autocratie a trouvé son ancrage dans les affaires de pots de vin liés au scandale Petrobras. Vrai ou faux, elles n’en ont pas moins entaché l’image de l’ex-syndicaliste Lula, parfaitement discrédité jusqu’au coeur de son électorat de base, les favelas. Le résultat est martial puisqu’un ancien militaire a été élu à la présidence. Deux de ses conseillers les plus proches sont des généraux.

L’être humain sait-il gérer ses libertés? On peut se le demander au vu de la situation au Brésil. Ce pays, l’un des Etats les plus peuplés au monde, semble revenir ainsi à ses anciens démons. La soumission au consumérisme et au pouvoir économique en plus, la morale religieuse en moins. Loin, très loin de Dom Helder Camara, l’évêque des pauvres et chantre de la non-violence, le meilleur soutien civil de Bolsonaro est un pasteur évangéliste davantage connu pour ses diatribes contre certaines minorités que pour ses interventions contre la destruction de la forêt amazonienne.

Christian Campiche

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