Chronique climatique – Pourquoi il est important de soutenir les gymnasiens qui manifestent


Lors des manifestations d’il y a quelques jours dans plusieurs villes de Suisse (Fribourg, Lausanne, Neuchâtel, Zürich, …), les étudiants ont revendiqué que les gouvernements à tous les niveaux déclarent l’urgence climatique et prennent des mesures concrètes contre le réchauffement. Et à Fribourg, des gymnasiens ont lancé une pétition pour interdire le déplacement en avion lors des voyages d’études.

On peut se demander si une restrictions de l’usage de l’avion seulement pour les voyages d’études est appropriée. Et pourquoi pas également pour les voyages privés et/ou professionnels (vacances à l’autre bout du monde, conférences, Erasmus, …). Pourquoi ne pas limiter les voyages en avion pour les longues distances et promouvoir le train pour les déplacements plus courts p. ex. à l’aide du rétablissement des trains de nuit ? Et que penser du nombre de vols de jets privés  la semaine dernière à l’occasion du WEF à Davos qui devrait atteindre 1500 contre 1300 un an plus tôt selon la société d’affrètement Air Charter Service (ACS). Un paradoxe alors que le changement climatique a été placé au premier rang des risques pour l’économie mondiale par les participants au Forum [RTSinfo, 22.1.2019]. 

De manière plus générale, est-il vraiment raisonnable de restreindre la mobilité des étudiants, mobilité acquise relativement récemment qui leur permet d’étudier à l’étranger et/ou de compléter leur formation par des contacts très enrichissants dans le monde entier, contacts qui leur serviront sans aucun doute plus tard dans leur vie professionnelle ?

Manifestations des étudiants dans les rues de plusieurs ville européennes, intervention de Greta Thunberg au WEF, plainte déposée pour inaction climatique contre le gouvernement hollandais, toutes ces actions servent à combattre la frilosité de nos dirigeants face aux trois grands défis de notre époque dont les étudiants prennent aujourd’hui activement conscience : le réchauffement climatique, la perte de biodiversité et la pollution. Et il y a d’autres moyens de mettre la pression sur l’inactivité des gouvernement, en particulier en s’appuyant sur les réseaux sociaux dont les étudiants de tous bords sont des experts : boycotts,  plaintes légales contre les gouvernements pour inaction climatique, militantisme, manifestations pacifiques, collaborations avec les « ainé(e)s »… toute action là où cela fait mal ! L’important est de maintenir la pression sous quelque forme que ce soit.

Quant au contenu, la proposition des gymnasiens est justifiée car l’utilisation de l’avion comme moyen de transport professionnel ou privé explose. Un avion émet trois fois plus  de gaz à effet de serre (GES) que la voiture et l’impact sur le climat a doublé en une vingtaine d’années. Il émet aussi des oxydes d’azote qui sont responsables de la production d’ozone et de la vapeur d’eau qui provoque des trainées de condensation (« Cirrus homogenitus »), nuages de haute altitude qui participent aussi à l’effet de serre. Si l’on prend en compte l’ensemble des gaz rejetés par le secteur aérien, celui-ci est en fait responsable de 5% du réchauffement climatique : l’aviation émet chaque année 650 millions de tonnes de CO2, soit autant que l’Allemagne en un an (!) et est à l’origine de 10% des GES émis par la Suisse.

Bien sûr,  il existe de très nombreux polluants qui pourraient être sujets à la vindicte estudiantine : on peut les classer par leur origine, par leur taille, par leur lieu d’émission. Les polluants primaires sont directement produits par les activités de l’homme ou par des sources naturelles alors que les polluants secondaires sont le fruit de la transformation chimique des premiers qui peuvent agir également de façon directe, indirecte ou synergique. Les sources de pollution sont très nombreuses : pollution de l’espace, pollution de l’air, pollution électromagnétique, pollution lumineuse, pollution de l’eau et des sols, pollution marine et bien entendu pollution nucléaire, pour n’en citer que quelques-unes.

L’idée que les émissions polluantes vont exercer leurs effets dans le voisinage du lieu de l’émission est erronée. Dans la grande majorité des cas, les polluants libérés dans l’écosphère sont entrainés très loin de leur point d’émission et ce sont les circulations atmosphériques et hydrologiques qui assurent leur dispersion dans l’ensemble de l’écosphère. Il existe pourtant des cas spéciaux tels que la pollution urbaine et la pollution des zones industrielles où la forte concentration et la pluralité des émissions amènent la formation d’un nuage de polluants au-dessus de ces zones dont l’extension dépend des mouvements atmosphériques et hydrologiques.

Plus aucun endroit sur notre planète n’échappe à la pollution des hommes. Une planète dont nous avons la responsabilité et que nous allons léguer à nos enfants. En fait, c’est l’addition de pollutions plus petites, locales, qui se combinent pour devenir une problème majeur, la pollution globale de la terre. A l’heure où l’on parle de réchauffement climatique et de perte de biodiversité, il est important de ne pas oublier que l’homme est en train de détruite son habitat… et qu’il n’y en a pas d’autres où l’humanité pourra émigrer. C’est pourquoi il est important de soutenir activement les manifestations de la génération suivante en faveur de notre terre.

Alain Heimo

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