Bonjour, un simple bonjour !


Ouvert, bienveillant, confiant, hospitalier, tels sont les mots qu’employait le philosophe Alain pour décrire le mot « bonjour » ! Banal, automatique, sans signification particulière pourrait être une autre série de descriptifs. Courtoise salutation, bonjour restera une toujours une façon de faire savoir à l’autre que l’on a noté sa présence et que nous voulons lui notifier.

Bonjour reste actuel, ponctuel, ciblé dans le temps puisqu’il se place dans cette journée qui égrène ses minutes au rythme du soleil ; il se différentie de l’adieu qui intime une séparation longue de signification.  Il s’impose dans l’aujourd’hui, qui signifie « au jour de ce jour » et crée le lien de proximité qui montre que nous partageons avec l’autre ces moments éveillés.

Jusqu’au 13ème s., on séparait les syllabes pour bien préciser que l’on souhaitait le bon jour, une belle journée à son interlocuteur ; avec le temps, on a abrégé la formule pour la rendre plus compacte, au détriment de sa signification, empressement oblige ! Alors, devrait-on essayer de lui redonner son sens avec ce qui l’accompagnait avant : comment allez-vous ?

Et, dans les autres langues, on retrouve le « hello » anglo-saxon qui est l’interjection que l’on lançait gentiment au cocher pour attirer son attention, le « ohayo » japonais qui se décline avec les périodes de la journée (konnichiwa dans l’après-midi), et ce très beau « salam ou shalom » des pays sémites qui indique bien ce que cette salutation veut engager : la paix !

Le bonjour reste prépondérant dans la salutation de mise en société et, dans la plupart des pays, c’est cette interjection qui sera préférée à tout autre.  Cependant, on va trouver, chez les plus jeunes, une abréviation du sens fondamental de la salutation propre à toute société organisée : salut ! Cette dernière forme de civilité st aussi l’apanage des forces armées…

Mais pourquoi doit-on se poser la question de ce que représente cette interjection ? Parce que la disparition progressive d’une expression plutôt réservée à un espace clos et réduit, semble pointer doucement mais sûrement vers le manque d’intimité.  C’est-à-dire que la société que nous avons mis 5000 ans à créer se délite au profit d’une individualité forcenée.

Il est loin le temps où l’on s’arrêtait pour échanger deux-trois mots polis avec son voisin ou l’attention que l’on prenait de soulever légèrement son galurin afin d’exprimer une forme de courtoisie à l’égard du concitoyen que l’on croisait.  Si l’on va éviter la nostalgie évoquée, on n’a pas, pour autant, beaucoup gagné sauf ces quelques secondes qui nous freineraient…

Or, cet individualisme sans courtoisie qui nous enferme derrière nos objets connectés, qu’ils soient nos téléphones, enregistreurs ou autres apanages modernes cloués à nos oreilles, est un danger considérable quand il s’agit d’écouter notre petite voix. Santé, comportement, mine, présence ou absence remarquée… tout est indicateur d’un voisinage serein ou non. 

Nul besoin de forces armées dans nos rues, ni de patrouilles civiles, ni de délateurs voisins ! Si nous rétablissions ce simple partage dans nos rues, quartiers et villes, nous aurions tous les indices nécessaires pour assurer une paix prolongée, un salam ou shalom bien ancré… et pas seulement un faux-semblant d’intérêt jeté de façon banal et automatique vers l’autre.

Retour au respect (re-specto : je regarde l’autre avec attention), souci pour son voisin et le ‘petit vieux’ que l’on n’a pas vu depuis quelque temps, ambiance bon enfant de société, de vraie société ! J’aime ce Bonjour, auquel je rajoute volontiers un Monsieur ou Madame de politesse et pourquoi pas la formule d’intérêt général : comment allez-vous aujourd’hui ?

Je suis Respect, je suis Bonjour!

Martin de Waziers

St-François by night. Photo SDR

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