Climat et biodiversité, un nouvel activisme politique


Bien avant Extinction Rebellion (DP 2243) et ses petits déjeuners festifs sur les chaussées, bloquant le trafic pour alerter sur la sixième extinction – réalité désormais confirmée par des rapports scientifiques –, les cyclistes de Critical Mass occupaient les rues le dernier vendredi de chaque mois, ralentissant ainsi le mouvement des voitures avec le slogan «Nous ne bloquons pas le trafic, nous sommes le trafic».

Le mouvement, né à San Francisco en 1992, s’est peu à peu étendu dans toutes les villes de la planète, du moins dans celles où il est possible de manifester librement. Ce cortège du vendredi se déroule chez nous à Genève et à Lausanne. Il s’agit le plus souvent de promouvoir la mobilité douce et de remettre en question l’usage intensif de l’automobile. L’appellation Critical Mass viendrait d’observations de la circulation en Chine où, faute de feux rouge, les cyclistes attendraient d’être assez nombreux, donc de former une masse critique, pour franchir un carrefour.

Critical Mass n’a rien de neuf. Vieux de 25 ans, il ressemble à une aimable tradition sociale de militants écologistes. Mais il rencontre un succès grandissant, lié aux luttes pour le climat. De fait, un mouvement nouveau tel Extinction Rebellion présente de nombreux points communs avec Critical Mass et relève d’une culture similaire.

Tout d’abord, ces deux mouvements viennent de l’univers anglo-saxon, Critical Mass de Californie, la pointe avancée de l’innovation en Occident et Extinction Rebellion de Londres, la ville-monde où toute la planète se retrouve. Ces formes d’actions gardent leur appellations anglaises, des labels reconnus même dans nos contrées. De plus ces mouvements n’ont pas de dirigeants, ni de figures qui se détachent. Les réseaux sociaux sont devenus leur substrat, leur vecteur d’information. La non-violence reste leur arme favorite, mais une non-violence très élaborée. Leurs actions visent avant tout la circulation motorisée dans les rues des villes.

Les cyclistes de Critical Mass gênent la circulation automobile juste assez longtemps pour que les conducteurs des voitures se rendent compte de la situation, mais pas assez longtemps pour qu’ils s’énervent. Les petits-déjeuners sur la chaussée d’Extinction Rebellion durent juste le temps de commencer à perturber réellement le trafic et de provoquer une intervention policière.

Les militants des partis politiques en sont toujours aux distributions de tract dans les marchés, première étape du cursus, avant même de figurer sur une liste électorale. Mais les actions innovantes sont plutôt dans ces nouveaux mouvements qui, bien sûr, ne se développeraient pas sans l’Internet, tout comme le militantisme traditionnel n’aurait pas existé sans les journaux, les ronéos et plus tard les photocopieuses. 

Les évolutions seront passionnantes à observer ces prochaines années: gageons que d’autres Critical Mass et d’autres Extinction Rebellion ne manqueront pas de surgir. Si la gauche et les Verts se montrent sensibles aux questions qui préoccupent à juste titre ces mouvements, reste à convaincre une majorité de prendre les mesures concrètes propres à y répondre.

Jacques Guyaz

Domaine Public

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